18 février 2013

L'Odyssée d'une mère souris

C'est évidemment avec le zèle de la nouvelle convertie que je m'empresse de vous parler de notre dernière lecture de Ponti : Pétronille et ses 120 Petits. Elle confirme donc que papoose n°1 est fascinée par ces histoires aux rebondissements multiples et inattendus, peuplées de créatures farfelues. L'histoire est dense, surréaliste (on se demande quand même parfois si Ponti n'est pas sous l'emprise de quelque substance hallucinogène... je me permets quand même de remarquer au passage qu'on voit pas mal de champignons), mais cela ne semble nullement ébranler l'attention et le sérieux avec lequel elle écoute l'histoire.

sunrise petronille

 

Un matin, Pétronille, après avoir donné le biberon à ses 120 petits, part faire quelques courses. Mais sur le chemin du retour, un monstre pas finaud "qui mélange toujours tout" la prend pour une souris verte, et c'est là que les ennuis commencent. Il faudra à Pétronille braver tous les dangers, affronter des situations rocambolesques, consoler un dolmen triste comme un menhir, sécher les larmes d'une madeleine et bravement secourir ses petits des griffes de l'horrible sagoinfre pour que la petite famille soit enfin réunie et la paix retrouvée.

Le papoose en a réclamé la lecture plusieurs fois par jour toute cette semaine, suspendue aux péripéties de Pétronille d'un air grave, éclatant de rire immanquablement lors des mêmes passages : le biberon aux 120 tétines, la madeleine inconsolable, le sagoinfre pétrifié en éclair de pierre au chocolat.

biberon 120 tétines

Mon âme de mère y a vu un hymne à la maternité, avec cette Pétronille qui élève ses 120 petits qu'elle aime comme les 120 pétales d'une fleur dont elle est le cœur. Et quand vraiment elle se trouve en difficulté, c'est "la maman de toutes les mamans" (quelle invention extraordinaire... et qui tombe sous le sens !) qui vient lui prêter main forte.

 

maman fleur

 

Ponti mêle les clins d'oeil à l'univers de l'enfance (comme les comptines mises en image) au surréalisme tel que défini par Breton comme « automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer soit par écrit, soit par tout autre moyen le fonctionnement réel de la pensée »1

La narration, comme les dessins, fonctionnent par association d'idées, truffées de clins d'oeil. Les illustrations, à la fois en rupture et en continuité échappent aux codes classiques. Des expressions de la langue sont poétiquement imagées, telles le rideau de pluie que Pétronille écarte pour aller voir de l'autre côté. On voit aussi apparaître les fameux poussins, et aussi Adèle, dans sa forêt bibliothèque (savoureux concept !)

N'allez pas croire que je suis venue à bout de toutes mes premières réticences sur Ponti. Je n'aime toujours pas ses créatures bizarres qui semblent sortir tout droit d'un rêve inquiétant, et globalement je n'adore pas les dessins de ses personnages. Même l'adorable Pétronille est assez laide d'ailleurs. Et pourtant, l'esthétique de ses illustrations est ailleurs, et ses histoires ont la magie des rêves, justement. Peut être parce qu'elles nous confrontent à nos propres peurs, mais toujours avec un grain de folie et une surprenante inventivité. C'est prenant, rigolo, dramatique, poétique, et incroyablement riche et plein de surprises.

 

messieurs

foret bibliotheque

 (cliquez pour agrandir les images !)

 

Pétronille et ses 120 petits, Claude Ponti

L'école des loisirs

 

 

1 Manifestes du Surréalisme, André Breton

challenge

Posté par indienagawika à 21:53 - - Commentaires [4] - Permalien [#]
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Commentaires sur L'Odyssée d'une mère souris

  • Merci pour ton commentaire : je suis ravie que tu te retrouves un peu chez toi sur mon bateau livre ! Quant à "Pétronille et ses 120 petits" c'est notre album préféré de Claude Ponti excatement pour ce que tu décris : sa poésie surréaliste, ce bel hymne à la mère totale et à la famille soudée et prête à vivre 1000 aventures. Et même si comme toi au départ j'avais des réticences face à ces personnages ni animaux ni humains, l'intelligence de ces Objets litéraires non identifiés ne cesse de nous enchanter !

    Posté par Colette, 03 avril 2013 à 21:56 | | Répondre
  • Tu l'as très bien dit en quelques mots... "OLNI" touche juste pour décrire l'oeuvre de Ponti ! à très bientôt sur ton bateau ou dans mon tiroir

    Posté par indienagawika, 04 avril 2013 à 12:20 | | Répondre
  • Bonjour!

    Merci pour votre article, j'adore Ponti depuis très longtemps, ma mère nous les lisait souvent et elle continue de nous offrir pour noël les récents (nous avons respectivement 27, 25 et 20 mais nous aimons toujours cet univers onirique)!
    Pétronille est un de mes préférés! Votre article est des plus positif sur cet ouvrage mais figurez vous que je suis tombée dessus grâce à cette page http://www.liberation.fr/societe/2014/02/11/les-livres-de-jeunesse-a-bruler-pour-faire-plaisir-a-cope_979423 qui ne fait pas je trouve un usage très "réglo" de ce dernier...du coup, je pensais tomber sur article très très négatif sur cet ouvrage alors que ce n'est pas du tout le cas, loin de là...je pensais qu'il était mieux de vous prévenir quand même de l'usage que l'on fait de vos écrits!

    Posté par Lyrali, 12 février 2014 à 18:32 | | Répondre
    • Merci Lyrali de votre gentil commentaire, et d'avoir pris le temps de me signaler cette citation qui vous a paru déplacée. J'ai aussi lu l'article et j'ai été très surprise d'y trouver un lien vers mon blog ... et un peu gênée de cette ambiguïté, qui pourrait laisser penser que je m'associe aux détracteurs ignares et réactionnaires de la littérature jeunesse dés lors qu'elle sort de leur norme. Cependant, en lisant mon article et en visitant un peu le blog, je crois qu'on s'aperçoit assez vite de ce que je défends. L'article de Quentin Girard étant très 2nd degré, j'y vois plutôt de l'humour, (je l'ai tout de même contacté pour lui faire part de la légère gêne que j'ai éprouvé.)
      En tout cas, je vous remercie chaleureusement de votre prévenance, et vous souhaite de belles lectures, toujours riches et surprenantes... Peut être à bientôt par ici.

      Posté par indienagawika, 12 février 2014 à 21:20 | | Répondre
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