Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le tiroir à histoires
26 décembre 2014

Justice pour Louie Sam

justice

 

1884, Territoire de Washington. Les Etats d'Amérique du Nord ne sont pas encore unis. A vrai dire, ce ne sont pas encore tous des états. A l'ouest, de petites communautés de colons se sont installées, et essaient non sans mal de cultiver cette terre impétueuse, de domestiquer cette nature spectaculaire qui menace sans arrêt de reprendre le dessus.

La vie y est rude, et les dangers multiples. Les bêtes sauvages, les « sauvages » tout court que sont les tribus indiennes. Sans compter, comme partout ailleurs, la violence et la cupidité des hommes.

Lorsque George Gillies et ses frères et soeurs découvrent sur le chemin du catéchisme la maison en feu de James Bell, et à l'intérieur, son corps inanimé, l'arrière du crâne fracassé, la petite communauté est en émoi. Un émoi qui se transforme vite en furie.

Plusieurs éléments portent à croire que le coupable est Louie Sam, un jeune indien. Il ne faut pas longtemps aux hommes du village pour monter une expédition punitive et faire comprendre à ces sauvages indiens qu'ils ne s'en prendront pas à un blanc impunément. Contre l'avis de sa famille, George, décidé à devenir un homme, se joint clandestinement à l'expédition nocturne. Un cauchemar éveillé qu'il n'est pas prêt d'oublier...

Et si dans leur furie vengeresse, les hommes étaient allés un peu trop vite ? Et si Louie Sam n'avait pas tué James Bell ? Alors qui..? et pourquoi ?

 

Le titre original du roman, The lynching of Louie Sam annonce la couleur (écarlate) avec moins de nuance que sa traduction française. La nuance, c'est parfois ce qu'il y a de plus dur à saisir. Et l'homme, en meute, est une bête sanguinaire, primitive, qui semble perdre tout sens de la nuance et toute humanité.

Dans un décor de far ouest, au sein d'une communauté qui n'est soudée qu'en apparence, George devient un homme en se posant des questions et en refusant l'arbitraire et la sauvagerie. C'est le récit très juste du cheminement d'une conscience, malgré la pression collective qui cherche à l'étouffer.

Elizabeth Stewart retranscrit à merveille le climat suffocant de cette communauté de colons sûre de sa supériorité, repliée sur elle-même et prompte à se changer en meute, et des plaies qui la déchirent de l'intérieur. Une Petite Maison dans la Prairie en version sanglante, et un des aspects peu reluisants de la naissance des Etats-Unis sur fond (implicite) de génocide des nations indiennes.

Pourtant, si toute cette violence est bien là, Justice pour Louie Sam n'a rien d'un roman trash. La plume d'Elizabeth Stewart a une forme de douceur, de pudeur même. En confiant la narration à George, qui  découvre le monde des adultes avec un regard curieux, entre admiration et interrogation, elle donne à ce récit une forme de naïveté incroyablement lucide.

Un roman vibrant et intelligent, à lire absolument.

 

Justice pour Louie Sam, Elizabeth Stewart.

Thierry Magnier, 2014.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Le tiroir à histoires
Archives
Publicité