Châteaux de sable
Ils ont des affaires plein les mains et le sourire jusqu'aux oreilles. Une fillette et son papa arrivent à la plage. Devant un joyeux ballet de parasols bariolés et familles équipées de seau, pelles et bouées, ils s'installent. Le papa est assis dans sa chaise longue, la fillette entreprend de faire des pâtés. Ca sent bon la crème solaire et le sable iodé.
De l'autre côté, arrivent un garçon et son papa, qui s'installent juste à côté. Même ritournelle : chaise longue où papa bouquine, jetant de temps en temps un coup d'oeil par dessus son magazine, tandis ce que le petit garçon se lance dans une construction. Son beau château et les applaudissements un peu appuyés de son père suscitent la perplexité de la fillette, et l'agacement du papa d'à côté, décidé à donner un coup de main à sa rejetonne pour affirmer le génie bâtisseur de la famille. La bataille est déclarée, les papas retroussent leurs manches et se lancent dans des chantiers ambitieux.
Pendant que les papas sont redevenus des enfants, le petit garçon et la fillette se rapprochent et s'amusent.
Le jeu de symétrie des dessins, ou les pages face à face se reflètent et se répondent met en scène astucieusement la surenchère des égos paternels. Stéphane Henrich se régale à croquer ses personnages avec malice et un sens du burlesque inspiré. Pas besoin de texte, les illustrations saisissent les enjeux et l'état d'esprit des personnages, le jeu des regards, remarquable, en dit plus que n'importe quelle réplique. A l'arrière plan se dessinent d'autres scènes cocasses, et va et vient le manège des plagistes qui finissent par plier bagage à la fin de la journée, alors que la bataille des châteaux fait encore rage. La justesse de la scénographie et la fraîcheur du trait, toujours en mouvement, donnent volontiers l'impression d'un dessin animé. On croit voir les personnages bouger, avec leurs silhouettes désordonnées qui ont le charme ébouriffé des illustrations de Quentin Blake.
Un album d'une drôlerie et d'une fraîcheur réjouissantes !
Châteaux de sable, Stéphane Henrich
Kaléidoscope. 2016.