Chez moi
Parfois c'est au plus près de nous même que les voyages les plus lointains nous emmènent.
Dans Chez moi, le narrateur passe sa vie à rechercher son chez-soi. Sa maison, son cocon, un endroit dans lequel il serait bien pour de bon.
Ça commence par une petite maison de pêcheurs « Un petit rien du tout au goût salé, juste en face de la mer. » Un petit coin de paradis trop perdu, trop étroit pour le jeune artiste qui rêve de dessiner le monde. Alors avec son sac à dos et son carton à dessin, il part emménager dans la ville voisine, une belle ville animée, aux maisons à colombages et à la cathédrale célèbre. Puis dans une ville plus grande, plus belle, ville lumière et capitale des arts, où il devient un artiste reconnu.
Un jour, comme une envie de voir ailleurs, le voilà qui traverse l'Atlantique, puis parcourt le monde, trouvant logis dans des villes somptueuses ou des abris plus modestes au cœur de paysages grandioses. Et avec lui, à travers les beaux dessins de Sébastien Mourrain, on fait le tour du monde des plus belles constructions. On avait beaucoup aimé son trait dans Bigoudi, où il croquait avec virtuosité l'architecture New-Yorkaise, on retrouve ici son goût et son talent pour les constructions et les beaux paysages urbains (ou plus sauvages). Ses très belles planches sont magnifiées par le grand format de l'album et le choix d'une alternance texte/image réussie.
Enfin, notre artiste semble trouver son chez-lui. Devenu « grand », devenu peut être enfin lui-même, il boucle la boucle, et opte pour une petite maison toute simple, « Un petit rien du tout au goût salé, juste en face de la mer. »
On repense au très beau Chez Nous, de Carson Ellis, dont nous nous sommes régalés à l'automne dernier.
C'est avec beaucoup de poésie que Davide Cali nous raconte ce périple et cette quête de soi. Un voyage enrichissant, où chaque destination correspond à une maturation intérieure, et à la construction du soi. Un voyage au cours duquel la beauté de l'ailleurs a nourri et grandi son personnage. Il a alors suffisamment mûri pour recevoir et apprécier la beauté de chez lui, de là d'où il vient. Et peut être se poser, enfin. J'aime vraiment beaucoup la fin, en points d'interrogation et de suspension, le regard vers le lointain car l'horizon est large, le monde est vaste et tout reste ouvert...
Un album d'une grande beauté.
Chez moi, Davide Cali et Sébastien Mourrain
Actes Sud Junior, 2016.